Java, là où les volcans ne dorment jamais 2/2
Après être redescendu du Kawah Ijen, je mets le cap à l'est, vers ma prochaine étape, le volcan Bromo. Le Bromo d'après les guides touristiques, c'est censé ressembler à ça:
Au milieu de l'immense et verdoyante caldera du Tengger, trois petits cones volcaniques dont un qui fume, le Bromo. Et les lecteurs assidus du mon blog auront peut-être reconnu le majestueux Semeru en arrière plan.
Me voilà donc en ojek (taxi moto) sur la route du Bromo, profitant de ces agreables voyages cheveux au vent, répondant aux saluts de tous les gens que je croise (et il y en a un paquet sur un trajet de 50 km ! ). Puis, quittant les paysages de rizières, la route commence à s'éléver dans la montage et je commence petit à petit à ressentir une certaine gêne au niveau des yeux. J'ai les yeux qui piquent et je ne sais pas pourquoi. De plus je remarque que depuis un petit moment, il y a comme de la fumée dans l'air. Je mets cela sur le compte des incendis que les Indonésiens ont l'habitude d'allumer pour nettoyer leurs champs (et détruire leurs fôrets !). Mais au fur et à mesure que nous avançons, il devient évident qu'une couche de poussière marron recouvre les arbres, la route, les champs... Je réalise enfin que ce sont les effets d'une éruption volcanique. Et pourtant on est encore à plus de 20 km du volcan. Le Bromo est en éruption et je ne le savais même pas ! L'Indonésie, c'est un peu la France du 17ème siècle: les gens ne sont pas au courant de se qui se passent à plus de 20km de chez eux.
Plus on se rapproche et monte en altitude plus il y a de cendre. Les paysages d'altitude d'ordinaire d'un vert intense sont d'un marron monotone. Il n'y a plus rien dans les champs recouverts de cendres. J'arrive dans un monde marron: les maisons, les champs, la route et l'air. La pluie commence à tomber, une pluie chargée de cendres, difficile de garder les yeux ouverts sur la moto.
Enfin, à la tombée de la nuit j'arrive au village de Cemero Lawang qui se trouve sur les bords même de la caldera, face au Bromo. Un vent violent et chargé de pluie provient du fond de la caldera. Il fait 10 degrés. Dans la rue, on marche dans une épaisse couche de cendre, un peu comme de la neige mais en marron. Le brouillard empèche de voir l'éruption mais on entend ses explosions toutes les 5 minutes. La terre tremble, le soir dans ma petite chambre, je peux sentir mon lit bouger, ma bougie ne tient pas debout sur son support et se casse la figure à chaques explosion. Je porte tous les habits sur moi que j'ai emmené. Et là je me demande quand même où est-ce que je viens de débarquer. Malgrès un reveil programé à 4h, je n'arrive pas à dormir, à cause de l'excitation (et des explosions...) et je n'ai qu'une idée en tête: Aller voir ça de plus près !
Bon le lendemain, malheureusement la météo étant toujours aussi mauvaise, c'est rapé pour faire la photo du début de l'article. Je me ballade donc sur les bords de la caldera. C'est assez sinistre, c'est le moins qu'on puisse dire, comme si la vie s'était mise en hibernation le temps de l'éruption
Les champs sont vides, les gens restent à l'entrée de leurs maisons à se réchauffer autours de petits braseros.
Et parfois tel une lueur dans la nuit, un petit rayon de couleur apparait au milieu de ce monde monochrome.
Je décide de redescendre du volcan par la pente opposée pour atteindre la ville de Malang. Il me faut traverser ou contourner la caldera pour cela. Je me renseigne dans le village pour savoir si c'est possible. Tout le monde me dit qu'on ne peut pas passer par la caldera et qu'il me faut redescendre par la route par laquelle je suis arrivé, et contourner le volcan. Bref un détour de 60km !
J'ai quand même très envie de descendre dans dans la caldera. Il est officiellement interdit de descendre mais comme on dit: c'est l'indo ! donc je trouve quand même un fondu qui me dit que c'est très boueux en bas et qu'il faudra probablement marcher un peu mais qu'il accepte de m'emmener. Nous voilà donc parti, lui, moi et mon sac sur sa petite moto.
Descendre dans la caldera c'est un peu comme arriver au Mordor pour les fans de Tolkien. Tout est dévasté, il n'y a plus un arbre debout, pas un oiseau, pas de vie, juste un volcan qui gronde. On dirait la fin du monde.
La moto traverse un plaine inondé, la roue arrière dérape en permanance, plusieurs fois on manque de prendre un bon bain de boue. Parfois la moto s'enlise et il faut alors la pousser. J'en perds mes fidèles tongs. Elles qui ont survécues à tant de choses, là s'en était trop je crois... Me voilà vraiment comme un hobbit cette fois.
Puis, une fois de l'autre côté, il s'agit de remonter par une routes très raide et complétement dévastée. Donc on est là pieds nus, plein de boue sur les cailloux par 10°C à pousser une moto sous la pluie et on se dit que quand même la vie est belle !
Et je redescends donc de l'autre coté lui, complètement épargné par la volcan vers Malang. 
De Malang, je rentre sur Surabaya après un petit arret sur la route pour voir ceci:
Il s'agit d'un volcan de boue réveillé accidentellement en 2006 par une une société de forage pétrolier. Le volcan Lapindo, du nom de la société de forage (pas mal pour la pub !) recrache donc de la boue en permanance depuis 2006 et a enseveli plusieurs villages. Après avoir tenté de le boucher sans succès, la solution trouvée a été de construire une immense digue autour du lac de boue et de dévier la boue vers la rivière voisine qui se jette dans la mer. Sympas pour l'environnement !